Une fois de plus les compagnies aériennes n’hésitent pas à débarquer leurs passagers pour cause de handicap
Après Air France, Easyjet, Iberia ou même Ryanair, C’est maintenant à la tout jeune filiale à bas cout d’Air France de « montrer l’exemple ». Le 23 septembre dernier à l'aéroport d'Orly, huit jeunes âgés de 12 à 18 ans qui s’apprêtaient à embarquer pour Brest se sont vu refuser le droit de monter à bord du vol AF 7370. Un week-end en famille qui se termine pour ces huit jeunes qui devaient rejoindre dans le Finistère le seul établissement d’accueil spécialisé en France pour épileptique à Châteaulun.
Refus du commandant…
Un refus d’embarquement décidé par le Commandant de bord et la cheffe de cabine qui aurait estimé que la prise en charge de 8 jeunes handicapés est trop lourde. Des jeunes qui n’auront eu que pour seul motif de la part Commandant de bord ne pas « prendre de handicapés sur ce vol » selon Frédéric CANEVET-JEZEQUEL, directeur de l’institut spécialisé de Toul ar C’Hoat. Dans un premier temps à l'oral, la version officielle communiquée par Air France aux familles et à l'établissement des jeunes est « Absence de certificats médicaux rédigés en anglais ». Une version corrigée pudiquement sur les attestations de non-embarquement remises aux parents présents que le motif est « Non autorisation du pilote de passagers avec spécificités ».
Un vol que, pourtant ces huit jeunes empruntés depuis longtemps et pour lequel aucun problème n’avaient jamais été répertorier. « Cela fait 60 ans que cet établissement a ouvert, et ce petit groupe prend ce vol une semaine sur deux depuis des années au sein de différentes compagnies », explique Christophe LUCAS, le papa d'un garçon de 16 ans scandalisé par ce comportement.
« Quatre personnes par spécificité »…
Selon la compagnie Bulgaria Air, qui a désormais depuis le 16 septembre dernier en charge la sous-traitance de ces vols, n’acceptait à son bord que « quatre personnes à spécificité » différente de celle de Hop (filiale d’Air France). Une limite jamais communiquée à l’établissement dont les résidents proviennent de toute la France et qui n’apparaît pas dans les conditions de vente de la Compagnie Hop.
Des enfants totalement abandonnés à leur sort pendant près 1 h 30 munis d'un simple ticket-repas. Les accompagnants, non avertis, ayant quitté l'aéroport après avoir attendu la confirmation du décollage sur les écrans de l'aérogare. La compagnie qui aurait dû respecter envers ces enfants les règles du protocole Saphir et UM définis par Air France qui impose à celle-ci, une fois leurs accompagnants partis, de ne jamais les laisser seuls. Des parents prévenus par l’un des amis de Matys joignent son père Christophe LUCAS pour que celui-ci fasse demi-tour et leur vienne en aide.
Un manquement aux procédures…
« Un manquement grave de la part d'Air France car ils n'auraient pas dû rester seuls », déplorent l'association Épilepsie France qui s'appuie sur l'enquête menée par la journaliste Elsa GRANGIER. Une procédure destinée pourtant à assurer la sécurité et un accompagnement tout au long du vol des mineurs non accompagnés et des personnes handicapées ou à mobilité réduite.
Pour le père de Matys, « ces enfants sont victimes à deux titres ». Pour lui le « protocole n'a pas été respecté : ni par le commandant de bord et son équipage ni par la compagnie Air France (…) ce sont des enfants épileptiques et personne ne s'est préoccupé de savoir s'ils avaient besoin de soins. En outre, la compagnie aurait dû prévenir les parents de ces jeunes dès la notification du refus de prise en charge ». Mais ils sont victimes d’une discrimination avec le sentiment précise t-il « qu'ils ne font pas partie de la société, qu'ils sont des pestiférés. C’est un scandale ! (…) Et c’est le ressenti de ces enfants aujourd’hui, ils sont victimes à deux titres : ils ont une maladie handicapante au quotidien, et on les pointe du doigt », s’est révolté ce père de famille au micro d’Europe 1.
Une situation exceptionnelle…
Après la première version communiquée aux familles Hop ! précise dans un communiqué que « Cette situation exceptionnelle ne correspond pas au fait que Hop! transporte toute l'année de très nombreux passagers handicapés ». La Compagnie Air France qui de son côté reconnaît avoir commis une erreur présentant ces excuses aux parents. « Air France a fait une erreur. Nous avons lancé une enquête pour comprendre à quel moment de la chaîne de réservation cette erreur à put se produire » dira un responsable de communication Air France. Le père de Matys qui assure lui qu’il accompagnera son fils désormais a la porte de l’avion.
Pour l’association Épilepsie France et son président celui-ci déplore dans un communiqué, cette situation donne « un nouvel exemple de discrimination accrue par la violence du message adressé aux personnes épileptiques et, de façon générale, handicapées ». Une situation quotidienne que confirme le jeune Matys pour qui cette discrimination s’ajoute a son handicap qui est « déjà assez lourd comme ça ».
Des enfants qui auront pu finalement tout de même embarquer sur le vol suivant, mais « ne sont arrivés au centre qu'à 23 h 30 avec beaucoup de stress et de fatigue ». Épilepsie France d’ajouter qu’au-delà des défaillances constatées dans la prise en charge de ces mineurs non accompagnés et malades « Cette accumulation de comportements et de propos d'une violence extrême les amène à intérioriser une image d'eux-mêmes profondément négative, où la maladie et le handicap sont synonymes de faiblesse et sources de culpabilité. Le message qui leur est ainsi envoyé, c'est celui d'une société dans laquelle ils n'ont aucune place. »
Stéphane LAGOUTIÉRE
Sources : Épilepsie France / Air France / Hop
Publication : 25/09/2018
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